Apprendre la langue locale sauve des vies en République démocratique du Congo 

Apprendre la langue locale sauve des vies en République démocratique du Congo 

Goma, 25 février 2020 - Passionné par son travail d'engagement auprès des communautés touchées par le virus Ebola, l'anthropologue guinéen David Niabalamou a appris à parler deux nouvelles langues en douze mois, ce qui lui a valu le surnom affectueux de ‘David le local’ de la part de ses collègues. Ayant travaillé sur la réponse à Ebola dans sa Guinée natale de 2014 à 2016, Niabalamou était parfaitement conscient que la langue est essentielle pour gagner la confiance des populations.

« Pour moi, la meilleure façon de m'intégrer dans une communauté est d'apprendre sa langue », dit-il. « C'est pourquoi c'était mon objectif. J'ai d'abord appris à connaître les gens, ce qui m'a permis d'apprendre la langue plus facilement. » 

Travaillant à Butembo et dans les environs pour sensibiliser les populations sur Ebola et la manière de se protéger contre le virus, il a rapidement appris le Swahili et le Nande afin d’atteindre tous les membres de la communauté. « Ebola est une maladie communautaire », dit-il. « Sans l'implication de tous les membres de la société, nos efforts sont voués à l'échec ». Pour lui, il est crucial d'être en contact avec les communautés pour les écouter, comprendre leurs sentiments et leurs expériences. « Chaque jour, je vais sur le terrain pour rencontrer les communautés avec lesquelles j'organise des dialogues, des rencontres communautaires pour venir à bout des rejets et des résistances sociales », dit Niabalamou.

Travaillant avec une équipe de cinquante-cinq personnes et couvrant quinze zones autour de Butembo, Niabalamou a œuvré à la sensibilisation et à la réintégration réussie des survivants d'Ebola dans leurs communautés en organisant des caravanes de réintégration qui célèbrent le retour de ceux qui ont survécu et encouragent leurs communautés à les accueillir à nouveau. Il a également organisé des journées de sensibilisation dans les écoles et a participé à des projets de développement local, comme la reconstruction d'un pont reliant un quartier défavorisé à son principal centre de santé, avec le soutien de l'OMS.  

« Il a fait un travail remarquable », déclare Dr Nzanzou Syalita, responsable de l'enregistrement du district. « Sans son implication personnelle dans la sensibilisation des ménages, Ebola aurait décimé notre communauté. Il a encouragé les communautés en leur donnant l'assurance qu'Ebola pouvait être guéri ; il a levé le voile sur les centres de traitement, en montrant que ce ne sont pas des endroits où on laisse les gens mourir. »

Niabalamou est particulièrement fier de la réussite de son travail de réintégration des survivants d'Ebola dans les régions de Katya, Matanda, Vutsetse Vutsundo, malgré la réticence des communautés. « Dans cette zone sanitaire, toutes les équipes d'intervention ont été rejetées parce que la communauté ne croyait pas en l’existence d’Ebola », dit-il. « Je suis intervenu auprès de certains leaders influents de la communauté, tels que le chef des jeunes et le chef des notables Nande, pour désamorcer la situation »

Un autre grand défi est la menace constante de violence dans une région où des groupes armés tels que les Maï-Maï sont présents de façon visible. « Ma détermination à être constamment sur le terrain n'a pas été vaincue par le défi sécuritaire qui se pose là-bas », déclare Niabalamou. « J'ai réussi à nouer des liens d'amitié avec les familles, ce qui m'a ouvert des portes dans toute la zone de santé de Butembo ».

Selon Niabalamou, l'instabilité de la région est la plus grande différence entre les épidémies d'Ebola dans sa Guinée natale et en RDC, et elle constitue un facteur majeur dans la prolongation de l'épidémie. « Chaque fois que nous approchons du bout du tunnel, les attaques arrêtent le travail des équipes d'intervention », dit-il, ajoutant que l'influence des groupes armés agissant dans leur propre intérêt a rendu difficile le travail des leaders cherchant à convaincre  leurs communautés d’adopter les mesures adéquates contre Ebola. 

Malgré les difficultés, la détermination de Niabalamou à faire partie des communautés locales a porté ses fruits, lui valant un deuxième surnom, cette fois-ci de la part des communautés dans lesquelles il travaille. 

« Il s'est rapidement intégré dans notre communauté en respectant tout le monde », explique le maire de Vulumba, Cyprien Sivyaghendera. « Nous lui avons donné le nom de Kambale car, selon la coutume Nande, le deuxième garçon du côté de la mère doit porter ce nom. Nous l'appelons Kambale pour dire à tout le monde que David Niabalamou est d'ici », dit-il.

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